I N S P I R A T I O N S


 

Ces textes sont extraits  de « Poèmes mystiques bengalis, chants Bâuls » dans la collection « Anthologie de la poésie universelle », éditions Saint-Germain des prés, 1977 dans la collection UNESCO d’œuvres représentatives, traduits et commentés par Mahmud Shah Qureshi. 
Ils illustrent que la quête du sens et le « Connais-toi toi-même » passant par le corps existent depuis longtemps partout sur terre avec la différence essentielle qu'en Occident elle est dissociée de la quête spirituelle depuis le XIXème siècle.

 

« J'atteste qu'il n'y a d'être humain que celui dont le cœur tremble d'amour pour tous ses frères en humanité, celui qui désire ardemment, plus pour eux que pour lui-même, liberté, paix, dignité, celui qui considère que la vie est encore plus sacrée que ses croyances et ses divinités.J'atteste qu'il n'y a d'être humain que celui qui combat sans relâche la haine en lui et autour de lui,celui qui dès qu'il ouvre les yeux le matin se pose la question « que vais-je faire aujourd'hui pour ne pas perdre ma qualité et ma fierté d'être un homme ? »

Abellatif Laâbi poète et écrivain marocain emprisonné pendant 8 ans sous la dictature d'Hassan 2

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« Si tu ne connais pas ton cœur, comment pourras-tu connaître ton prochain ?

Fais de ton prochain ton semblable en cherchant à savoir qui il est.

Il sera cher à ton cœur.

Essaie de le saisir en te connaissant toi-même.

Fais que ce tout ce qui existe en dehors de toi prenne place en toi-même.

C'est alors que tu saisiras l'Homme Simple et Insaisissable.

Tu le verras de tes propres yeux, tu demeureras dans le bonheur avec Lui,

tu ne tomberas pas dans le puits du monde.

Mais surtout n'oublie pas de soumettre ton cœur aux Pieds Rouges.

Le fou Kâlacând dit : « C'est bien ainsi que je l'entends, mais sans la miséricorde du Gourou comment y parviendrai-je, moi qui suis sans dévotion ? »

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« Le corps humain est une terre imaginaire;on peut récolter le trésor en la soignant.

L'espoir de la venue au monde s'accomplira si elle est cultivée au bon moment.

Utilise la semence de l'action comme une charrue et laboure la terre avec six bœufs.

Les fruits viendront en temps voulu si tu jettes les graines au moment convenable.

C'est grâce à la miséricorde de Dieu que tu possèdes cette terre immense.

C'est à toi de la faire fructifier par la semence purifiée du Mantra.

Si la plante pousse tu trouveras la graine à la racine.

Le fou Kâlacând dit : Si ta méditation se fonde sur la Vérité et si le lotus de ton âme est baigné d'amour les fleurs s'épanouiront dans l'eau »

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« Je n'ai pas trouvé l'Homme de cœur,voilà ce à quoi je pense.

Ma douleur repose dans mon cœur, voilà ce à quoi je pense.

Tout le monde voit que la forêt brûle mais personne ne voit le feu dans mon cœur.

Dans quelle ombre puis-je apaiser mon âme ?

Par quelle méditation pourrai-je obtenirce qui est le trésor de ma vie ?

Je n'erre qu'avec ce seul espoir.

Je suis allé prier sur les tombes et dans les mosquées ; j'ai demandé à tous les Mullâh et les Munshi où je pourrais L'obtenir.

Miâjân fakir dit : « Il reste enfermé au coin de ta maison, et toi parce que tu es aveugle de jour et fou de nuit tu ne l'as pas vu »

Ma douleur repose dans mon cœur, voilà ce à quoi je pense. »

Petite explication de texte, le terme gourou signifie en sanskrit enseignant, précepteur ou maître spirituel, sans connotation d'abus, d'emprise et autres prises de pouvoir. Tout comme senseï en japonais, souvent mal traduit comme maître et qui signifie juste « celui qui est né avant » dans la pratique, que ce soit l’aïkido, la cérémonie du thé ou l'arrangement floral l’ikebana. Et rien à voir avec la dualité occidentale maître esclave, mais une relation maître élève où l'élève choisit librement, en conscience et avec discernement de se positionner afin de recevoir un enseignement, rien à voir avec une soumission aveugle et infantile à une autorité supérieure.

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Mon texte préféré sur le lâcher-prise extrait de « Le Très-Bas » de Christian Bobin :

« Trois mots donnent la fièvre. Trois mots vous clouent au lit : changer de vie. Cela c'est le but. Il est clair, simple. Le chemin qui mène au but, on ne le voit pas. La maladie c'est l'absence de chemin, l'incertitude des voies. On n'est pas devant une question, on est à l'intérieur. On est soi-même la question. Une vie neuve, c'est ce que l'on voudrait mais la volonté, faisant partie d ela vie ancienne, n'a aucune force. On est comme ces enfants qui tendent une bille dans leur main gauche et ne lâchent prise qu'en s'étant assurés d'une monnaie d'échange dans leur main droite:on voudrait bien d'une vie nouvelle mais sans perdre la vie ancienne. Ne pas connaître l'instant du passage, l'heure de la main vide »

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Puis corps, écrits du corps, mots et maux du cœur ...

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« Corps, esprit, émotions, conscience, entremêles, dansants, luttants, proches ou éloignés, légers ou pesants,proches ou éloignés,séparés,isolés,unis......

Corps de verre, corps de pierre, de plaisir ou de douleur, de souffrance ou de performance.

Corps outil, corps objet.

Corps présent, vibrant, vivant, aimant, lumineux, aérien, libre,conscient, spirituel.

Corps fardeau, lourd, blessant,inerte, absent, répugnant , obscène.

Corps de joie, corps de croix.

Corps prison, corps sexuel, ami, ennemi, mort, sain, dépendant, sportif, mou, honoré, violé,sacré, vulgaire.

Corps chantant, corps muet, coloré, sombre.

Toutes ces dimensions font notre commune humanité. »

Pour terminer ...

« L'amour est la raison, l'amour est le but, l'amour est le chemin »